La politique, l’Afrique et le monde
« Les archives répondront un jour à vos questions », répond Foccart pour ne pas en dire plus sur l’opération « Homo » du SDECE contre le Camerounais Félix Moumié en 1960. « Foccart est au parfum », s’écriait-on déjà, à tort et à travers, en pleine affaire Ben Barka en 1966, comme une invocation protectrice immanente mais invisible.
Rarement un homme a-t-il suscité autant de fantasmes dans l’histoire contemporaine de la France. Le plus proche collaborateur du général de Gaulle à l’Élysée reste dans l’imaginaire collectif l’homme aux lèvres scellées. Malgré la publication au crépuscule de sa vie de deux tomes d’entretiens et de son Journal de l’Élysée, l’image sulfureuse du chef « barbouze » qui emporte dans sa tombe les secrets de la République a longtemps prévalu. C’était ignorer qu’un demi-kilomètre d’archives produites par Foccart et ses collaborateurs au sein de son secrétariat général des Affaires africaines et malgaches, ancêtre de la cellule Afrique de l’Élysée, avait été collecté par les Archives nationales à partir de 1977.
Au terme de douze années de travail de classement, les Archives nationales ont publié en 2015 l’inventaire des archives du secrétariat général des Affaires africaines et malgaches, dit « fonds Foccart ». Un programme de dépouillement a été mené par des équipes de chercheurs spécialisés dans l’histoire de la Ve République, celle des outre-mer et celle de l’Afrique contemporaine.
L’exploitation de ces sources offre un nouvel éclairage sur le mythe Foccart, l’histoire de la création de la Ve République, l’invention des DOM-TOM dans les Antilles, l’océan Indien et le Pacifique, et enfin l’histoire de la décolonisation de l’Afrique subsaharienne et de ce qu’il est convenu d’appeler la « Françafrique ».
Préface, par Françoise Banat-Berger (Archives nationales)
Introduction, par Olivier Forcade (Université Paris-Sorbonne)
Première partie / Portraits d’acteurs
Chap. 1. Foccart face à ses sources (Jean-Pierre Bat, Archives nationales)
Chap. 2. Journiac, « le Foccart de Giscard » ? (Pascal Geneste, Archives de la Gironde)
Chap. 3. Félix Houphouët-Boigny, le ministre français qui est devenu chef d’État (Frédéric Grah Mel, École normale supérieure d’Abidjan)
Deuxième partie / La décolonisation à la lumière du fonds Foccart
Chap. 4. La transition de l’outil militaire en Afrique de l’Ouest : le cas de la Mauritanie et de l’Entente (Arthur Banga, Université Félix-Houphouët-Boigny, et Camille Evrard, Université de Toulouse)
Chap. 5. Symphonie militaro-sécuritaire sur la Grande Île. Madagascar et l’ordre foccartien (Nicolas Courtin, Université Paris-Diderot)
Chap. 6. Jacques Foccart et le Niger : le briseur du Sawaba dupé par les militaires (1958-1974) (Klaas Van Walraven, African Studies Center de Leyde)
Chap. 7. Bob Denard : les archives d’un mercenaire foccartien (Walter Bruyère-Ostells, Sciences-Po Aix)
Chap. 8. « Chasse gardée » au Cameroun ? Le secrétariat général des Affaires africaines et malgaches et la gestion des sphères d’influence française et britannique en Afrique de l’Ouest (Mélanie Torrent, Université Paris-Diderot)
Chap. 9. La France, l’Afrique et la connexion marocaine (Pierre Vermeren, Université Paris I Panthéon-Sorbonne)
Chap. 10. Refaire le procès d’une victime tahitienne de la Grandeur. Quête et requête en faveur de l’innocence du député Pouvanaa a Oopa (Jean-Marc Regnault, Université de Polynésie)
Chap. 11. Les Archives des rues Oudinot (Outre-Mer) et Monsieur (Coopération) au prisme de Foccart (Anne Kinoshita-Leblay, BnF)
Troisième partie / La « méthode Foccart »
Chap. 12. Foccart, l’OAS et l’extrême-droite (Olivier Dard, Université Paris-Sorbonne)
Chap. 13. Foccart et le Service d’action civique (François Audigier, Université de Lorraine)
Chap. 14. Foccart au miroir du SDECE des années 1960 : entre pré carré africain et guerre froide (Sébastien Laurent, Université de Bordeaux)
Chap. 15. Politique de l’urgence contre la décolonisation. Foccart, conseiller présidentiel pour les départements d’outre-mer (1958-1974) (Sylvain Mary, Université Paris-Sorbonne)
Chap. 16. Jacques Foccart : pourquoi la légende noire ? (Frédéric Turpin, Université de Savoie)
Quatrième partie / Affaires diplomatiques & diplomatie d’affaires
Chap. 17. La politique du franc CFA (1959-1974) : le tournant de la décolonisation monétaire (Olivier Feiertag, Université de Rouen)
Chap. 18. La CEE et l’Afrique : quel projet de développement pour la coopération eurafricaine ? (1958-1972) (Guia Migani, Université François-Rabelais)
Chap. 19. Les enjeux de la « francophonie économique » : les voies renouvelées de l’influence français dans les années 1960 et 1970 (Laurence Badel, Université Panthéon-Sorbonne)
Chap. 20. Le nickel calédonien, un levier de puissance française en Océanie (1958-1974) (Sarah Mohamed-Gaillard, INALCO)
Chap. 21. L’Afrique du Sud, un partenaire particulier pour le « dialogue » (Anna Konieczna, Sciences Po Paris)
Conclusion.
Ouvrir les archives de la Françafrique…, par Saliou M’Baye (Archives du Sénégal et Université Cheikh Anta Diop)
Cartes (Afrique, Caraïbe, Pacifique)
Notices auteurs
Plan de l’inventaire Foccart
Bibliographie indicative
Index